Information Vinicole millésime 2023

Millésime 2023
« Aux couleurs de l’été indien »
Ce titre aurait pu aussi être « Année Rock’n Roll » ou « Au-delà des espérances ». L’embellie climatique, à partir d’aout 2023 a été fondamentale, et en contraste avec la première partie de l’année, certes douce, mais pluvieuse, peu solaire, et dès lors très exigeante pour la vigne, laquelle a demandé aux vignerons énormément d’énergie, notamment pour lutter contre le mildiou, très virulent durant ces mois-là. On aurait aussi pu craindre pour le volume récolté, mais de ce point de vue, d’une manière générale, le millésime est très généreux, et se place dans les très bonnes années depuis longtemps.
Ce fait contraste avec 2024, millésime durant lequel le mildiou aura tout du long été bien présent, sans répit, et aura sérieusement amputé le volume récolté, à part plus au sud.
Beaujolais
On y a constaté aussi l’effet rendement – dilution, sur les blancs comme sur les rouges. Mais également l’hétérogénéité : Il existe de belles cuvées, sur la finesse, l’élégance, le fruit. Ici, l’embellie de aout – septembre fut presque une sécheresse. Il fallait donc vinifier sans vouloir trop extraire, afin d’éviter de mettre en évidence des touches végétales. Pour nous, en 2023, il en résulte quelques belles sélections. Et ici aussi, le terroir parle.
La récolte fut bien moins généreuse en 2024. Les vins sont aussi plus légers, mais friands, gourmands très aromatiques et séduisants. Nous avons trouvé aussi de belles cuvées, pleines de « peps ».

Bourgogne
La récolte 2023 fut, en Bourgogne, abondante. Une fois n’est pas coutume : en témoigne à nouveau 2024, un faible millésime en volume.
Comme partout, trop de charge en raisins est rarement favorable qualitativement, à part peut-être pour le chardonnay, plus tolérant au rendement. C’est donc un millésime hétérogène. Il ne fallait pas trop laisser faire cette année la générosité de la nature.
Mais qui dit hétérogène, dit qu’il existe des très beaux vins. Quand cela a bien mûrit, on a des rouges fins, avec du fond, un style qui « pinote » bien, avec une belle aromatique. Les textures sont généreuses et souples. Les robes d’un beau rubis éclatant. Comme on aime. Après avoir trié, comme le veut notre métier, nous sommes très satisfaits de nos sélections.
Comme me le résumait Ludivine Griveau, régisseur du Domaine des Hospices de Beaune, « la maîtrise des rendements a été la clé en 2023. Il y a différents styles selon les terroirs et les dates de vendanges, mais les belles cuvées ont toutes un point commun : la qualité des tannins ».
Les vins rouges auront un bon potentiel de garde.
Les vins blancs sont généreux, avec du gras.
Nous aurons en 2024 des vins bien différents : plus légers en texture et degré, au fruit croquant, des acidités plus marquées. On regrette souvent un manque de fond. Notre préférence va donc aux 2023, sauf exception (et notamment les vins des Hospices, signe que les grands terroirs en 2024 ont fait la différence).

Languedoc Roussillon
Voilà une région qui souffrait depuis plusieurs années d’un grand déficit hydrique. Même s’il n’est pas totalement rétabli, les pluies furent plus abondantes et bénéfiques sur le printemps. Et la seconde partie de l’année a vu le retour du temps chaud et sec. Cela donne des vins avec une belle concentration, il y avait peu de jus. C’est un joli millésime, bien placé par rapport à 2022 et 2021.
Bordeaux
Bordeaux n’a pas échappé et au printemps pluvieux, et donc au mildiou. Il y a eu des dégâts considérables sur le merlot particulièrement. L’été indien a cependant bien joué, « sauvant » une belle partie de la récolte, qualitativement. Après notre travail de tri, nous aimons les 2023 car les cuvées réussies sont mûres, bien équilibrées, les tannins sont soyeux, il y a du volume et de la longueur.
Un millésime est souvent a apprécier de manière relative. Si les 2022 ont donné aussi grande satisfaction, par certain que ce sera le cas avec 2024. Sauf pour les blancs, magnifiques !
Loire
En 2023, à Sancerre et Pouilly, et plus généralement dans le Centre Loire, on est face à une très grosse récolte en volume. Les facteurs climatiques mentionnés en introduction y ont pleinement joué, et l’apport hydrique a été régulier. Ces rendements importants se ressentent dans certains vins, avec une sensation de dilution. Les cuvées qualitatives sont celles précocement récoltées, issues de vignes moins vigoureuses, et ayant une teneur en acidité correcte.
En Touraine, le millésime est plus jaloux. « Bizarre », comme me le disait un vigneron. La vigne semble avoir souffert des aléas climatiques pour livrer de bons raisins. Les vins sont certes riches, mais souvent les équilibres sont fragiles, et des défauts s’y sont glissés (volatile, tanins secs).
Nous préférons les 2024, année certes plus légère et plus vive, mais les vins sont droits, « francs de gout », et très joliment parfumés.
Alsace
Mêmes facteurs climatiques. Un millésime dès lors atypique, avec des gros rendements, et des acidités très « sages ». Des bons vins chez les bons vignerons, mais nous préférons les 2024 qui ont plus d’éclat.

La Vallée du Rhône
2023 est une année favorable également en vallée du Rhône, ici l’effet rendement est plus modéré, ce qui est une bonne chose. Le printemps y fut également maussade, mais le beau temps de l’été et particulièrement du mois d’aout ont endigué les attaques du mildiou. Les vins rouges sont riches, bien équilibrés. Quelques vins a éviter présentant des pointes d’acidité volatile (effet de la sécheresse). Dans l’ensemble on peut se réjouir d’un millésime qualitatif et de bonne garde.
En blancs, le topo est similaire, et voici une région qui connait tant en demande qu’en plantation, un engouement pour les blancs, avec des cépages autochtones qui en font des vins a très belle personnalité.
A noter que nous avons aussi beaucoup, mais beaucoup, apprécié les 2024 : Le millésime, plus frais, a donné dans les vins de magnifiques équilibres, un degré d’alcool plus sage, et qui offre d’excellentes sensations en bouche. Très grand coup de cœur.

Conclusion
Notre opinion sur 2023 : C’est, surtout à Bordeaux, en Bourgogne, et dans le Rhône, un beau millésime. Les vins ont du fond, sont mûrs, et une belle qualité de tannins. Ce sont des vins aptes à rester quelques années en cave si souhaité, « raisonnablement ».
Vous aurez compris que notre opinion est plus réservée sur 2024, à part dans le Rhône, et ailleurs sur les blancs et les grands terroirs de rouges.
Les prix sont plutôt stables, situation générée par une récolte 2024 modérée.
Bernard GRAFE